Il a posé ses valises au Chêne Pointu

Alain Dzukam, comédien, vient de Yaoundé. Entre sa « ville aux 7 collines », Paris et Marseille, il a posé ses valises à Clichy-sous-Bois, avec femme et enfants et a choisi de dédier sa vie au théâtre.

Pour Alain Dzukam, tout a commencé chez lui, au Cameroun, avec la radio. « Nous n’avions pas de télévision. C’est grâce à cette boîte magique que j’ai découvert les sketches du grand comédien Dieudonné Afana Abecon, alias Jean Miché Kankan. Il a vraiment nourri le quotidien des Africains. C’était merveilleux », raconte-t-il. Sa décision est prise : il sera « aussi drôle que lui ». Les cours de théâtre se succèdent, à l’école puis à l’université de Yaoundé. Il y créera la troupe Africa Cri Action. Son nom vole jusqu’à l’ambassade de France qui le convie pour animer les soirées officielles. « Nous avons monté Don Juan de Molière. On était plutôt bons jusqu’au point où, en 1992, le Festival d’Avignon nous a invités ! » Pour Alain, c’est l’éblouissement. « Cette ville vit à l’heure du théâtre. J’étais comme un pygmée tombé à Disneyland », s’esclaffe-t-il. Son Don Juan a un succès retentissant. « Nous avons eu une couverture presse incroyable, se souvient-il. Libé, Le Monde, etc. Des articles partout. » Entre Yaoundé et Paris, il réussit à entrer au cours Florent, travaille au théâtre Toursky de Marseille, suit Philippe Adrien à la Cartoucherie de Vincennes pour monter Le Roi Lear et Le Malade Imaginaire, ce qui lui permet d’obtenir enfin son statut d’intermittent. 2003, il pose ses valises à Clichy-sous-Bois, au Chêne Pointu. « Un F4, le bonheur malgré quelques difficultés à m’intégrer ». Mais, insiste-t-il, « c’est bel et bien là que je me suis reconstruit, posé, et où ma femme et moi élevons nos trois enfants. Quand on n’y habite pas, il est difficile de réaliser l’extraordinaire humanité que l’on trouve auprès des habitants du Chêne Pointu. » Arrive le tournage d’Hippocrate, un film de Thomas Lilti, dont le frère est le président des Compagnons Bâtisseurs de Clichy-sous-Bois. « Une belle expérience, raconte le comédien. Mon plus beau souvenir est une impro. Je me suis mis à chanter et ça a mis une ambiance dingue. D’ailleurs Thomas a gardé la séquence au montage ». Sous le Chapiteau de la Fontaine aux images, dans le froid de l’hiver, le comédien se lève et déclame une strophe de Sganarelle, son rôle fétiche de Don Juan. Qu’il conclut par un immense éclat de rire qui sonne comme un feu d’artifice dans la pénombre de la fin de l’après-midi. « Le théâtre est une tribune. Le théâtre est une chaire. Le théâtre parle fort et parle haut ». A croire que Victor Hugo a écrit ces lignes pour Alain Dzukam.

Article publié dans Le mag n°102 Mars-avril 2015

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